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Interview de Bertrand Moulinet, sélectionné sur 20km et 50km marche aux JO de Londres 2012

A Londres, il va défendre les couleurs de la Picardie mais il est sûrement, un de nos athlètes les moins connus. Pourtant, les mérites de Bertrand MOULINET (Amiens UC) qui va participer aux épreuves des 20 et 50km marche sont évidents. Nous l'avons interrogé afin de mieux le découvrir.

Bertrand MOULINET est un garçon qui mérite la considération car la discipline qu'il pratique est difficile voire ingrate.

Afin d'être prêt pour les Jeux Olympiques, Bertrand MOULINET se prépare actuellement à Font Romeu où il est en stage et accumule les kilomètres à l'entrainement.

A Londres, Bertrand MOULINET va participer au 20 km marche le 4 août et le 11 août au 50km. Il espère améliorer ses meilleures performances qui sont de 1h20mn52s et 3h50mn49s.

Bertrand, depuis quand pratiquez-vous la marche ?

Je fais du sport depuis que j'ai 3 ans. A 6 ans, j'ai commencé la compétition par la course à pieds au club d'athlétisme de l'ASPTT Toulouse. Ce qui me plaisait c'était les cross. J'ai toujours aimé courir dans les champs, les forêts,...
Puis j'ai débuté le cyclisme de compétition à l'âge de 10 ans. C'est vraiment un sport qui m'a marqué. J'y ai énormément appris sur l'hygiène de vie et l'exigence que l'on doit s'imposer si l'on veut pouvoir utiliser les pleines capacités de notre corps.
A 18ans, en Septembre 2005, j'ai intégré l'école de Police de Toulouse et j'ai arrêté le cyclisme en compétition.
Je n'avais pas pour autant envie de cesser toute activité physique. J'ai donc commencé la marche athlétique en Décembre 2005, 3 mois après avoir arrêté le cyclisme de compétition et intégré l'école de Police de Toulouse.

Comment votre vocation pour cette discipline est-elle venue ?

Ce qui m'a attiré vers la marche, ce sont les histoires que me racontait mon père (ancien marcheur international sur 20 et 50km / Recordman et Champion de France du 100km ) quand il avait pris le départ du légendaire "Paris-Strasbourg" et gagné plusieurs de ses épreuves sélectives sur 200kms.
Ce qui m'a tout de suite plu dans ses histoires d'ancien combattant, c'était d'imaginer plusieurs hommes en train de se "tirer la bourre" des heures durant, partant d'une ville pour en rallier une autre, sur plusieurs centaines de kilomètres.
Hélas, la marche athlétique de haute compétition ce n'est pas çà. On doit se contenter de 20kms ou 50kms sur des circuits formatés d'un ou deux kilomètres à parcourir X fois...
Heureusement pour moi que les séances d'entraînement me permettent d'assouvir ma soif de kilomètres, de paysages à découvrir, de côtes à grimper, ... à pieds !

Dans quel club avez-vous démarré et quand avez-vous signé à l'Amiens UC ?

Comme pour faire de la marche en compétition, il faut une licence d'athlétisme, j'ai rejoint le club de mes débuts : l'ASPTT Toulouse.
Seulement, le niveau de mes performances allant en augmentant, si je voulais encore progresser il fallait que je m'investisse plus dans ma préparation. Cela impliquait de bénéficier d'un soutien financier de la part de mon club, mais aussi des collectivités territoriales.
Je n'ai pas pu trouver ce soutien en Midi-Pyrénées.

Alors, en Juin 2009, juste avant de participer aux Championnat d'Europe Espoirs, j'ai contacté la quasi-totalité des clubs d'athlétisme de France pour leur faire part de mon projet et solliciter leur aide. Quelques-uns m'ont répondu, dont l'Amiens UC.
J'ai vraiment apprécié que ce soit le président qui me contacte directement et par téléphone. J'ai tout de suite senti un dirigeant honnête et un homme de parole.
C'est extrêment rare dans le milieu de l'athlétisme français.

Puis je connaissais déjà les marcheurs de ce club, Eddy Rozé et Christine Guinaudeau pour les avoir fréquenté en Equipe de France. çà aussi çà a joué.
En Septembre 2009, l'Amiens UC m'a acccueilli et s'est occupé de moi.

Quelles sont vos grandes victoires ?

Si par "victoire" on entend gagner des courses, alors je n'en ai pas connu de grandes. Mais je fais le maximum pour que çà arrive bientôt.
Si par "victoire" on entend une victoire sur soi-même, alors je dirais que ma plus grande satisfaction c'est d'avoir résisté aux obstacles et personnes qui se sont mis en travers de mon chemin.
Mais, il me reste encore des problèmes à solutionner pour que je puisse enfin m'entraîner sereinement et pouvoir atteindre le top niveau mondial.

Quel est votre entraînement ? Comment se fait-il ?

Depuis Mai 2009, j'ai la chance de pouvoir bénéficier des conseils de Gérard Lelièvre.
Cet homme est, de mon point de vue, le plus grand marcheur français. Il a été recordman du Monde du 20km Marche en 1979 et terminé 5e du Championnat du Monde en 1983.
Plus que ses résultats, ce qui impose le respect c'est qu'il fut un pionnier de notre discipline. il a dû réfléchir et concevoir par lui-même des techniques d'entrainement. En les mettant en pratique, il a pu ainsi distinguer l'utile du futile.
Grâce à son expérience, je ne perds pas de temps. J'en gagne même ! En 3 ans je suis passé d'1h27'45'' à 1h20'52'' sur 20km Marche.

Je passe une grande partie de l'année à m'entrainer en montagne, autour de la ville de Font Romeu, dans les Pyrénées-Orientales.
L'entrainement en altitude est une des constituantes majeures de mon entraînement.
Son contenu est extrêmement variable en fonction de ma condition physique, de la période de l'année, et de l'objectif à préparer.
Néanmoins, le principal axe de travail reste l'endurance. Le volume hebdomadaire d'entrainement peut varier de 150 jusqu'à 300 kilomètres.
Il ne faut pas se leurrer, je pratique une discipline où la quantité de travail est indispensable pour pouvoir maintenir une intensité élevée sur de longues distances.
Mais ce n'est pas rébarbatif pour autant puisqu'avec mon entraîneur je n'enchaîne jamais 2 journées d'entrainement identiques.

En dehors de la marche, quelle est votre situation professionnelle ?

Je suis Policier, affecté au service de la Police Aux Frontières de Menton dans les Alpes Maritimes depuis Décembre 2007.
Et, depuis Janvier 2010, mon administration m'a rattaché au groupe des Sportifs de Haut Niveau de la Police Nationale et me fait bénéficier d'un aménagement de mon temps de travail.
Je suis ainsi détaché de tout service actif à 70% de mon temps de travail annuel. C'est vraiment la principale raison de ma réussite sportive et j'en suis reconnaissant auprès de toutes les personnes qui ont oeuvré pour que je puisse en bénéficier.
Sans cela, je n'aurais jamais pu me sélectionner pour les Jeux Olympiques.

Qu'attendez-vous de Londres ?

Même si, au regard des résultats des précédents J.O., mes performances pourraient me permettre raisonnablement de terminer parmi les 16 premiers, je sais par expérience que regarder les bilans est une mauvaise chose.
C'est pour çà que je ne souhaite pas me fixer d'objectif de place pour le moment.
Je préfère voir cet évènement comme l'opportunité d'améliorer mes records personnels sur 20 et 50km. Ce serait déjà bien pour moi !

Propos recueillis par Lionel HERBET

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